Le Paon

Cette peinture fait partie d'un ensemble de neuf panneaux intitulé Moisson : Les Anges lançant des pierres sur la ville, Le Paon, apparaît auprès du Phénix, de La Récolte, Pieds foulant le raisin, Le Prophète, Le Tsar , Ville inondée et Femme sur animal monstrueux. L’artiste s’est inspirée librement d’images de l'Apocalypse, de fresques byzantines et d’images populaires russes. Dans ce cycle peint dans une même explosion de violet, jaune, vermillon et outremer, rythmés par quelques accents de blanc, Gontcharova célèbre le folklore slave dans un style rayonniste qu’elle fonde à cette époque avec Mikhail Larionov. Le rayonnisme est un mouvement qui entend matérialiser plastiquement l’énergie vitale grâce à un langage pictural composé de faisceaux lumineux, de contrastes colorés et d’intersections de plans. L’oiseau se déploie ici sur un fond sombre, son ramage formé de zébrures chatoyantes produit un puissant effet hypnotique.
L’oiseau de feu est un animal légendaire du folklore russe. Il ressemble au paon qui est, dans de nombreuses religions, un symbole d'immortalité et de lumière. Gontcharova affectionne son caractère solaire et triomphal et le représente dans plusieurs de ses tableaux de manière très variée. Elle met ainsi en évidence la manière dont la culture paysanne russe côtoie autant les thèmes religieux que les contes traditionnels. Elle restitue cet imaginaire présent dans la vie quotidienne des paysans, à travers l’artisanat. Le lien avec la peinture religieuse ne s’arrête pas là. L’exposition des 9 tableaux de la série peut se rapprocher d’une iconostase, cloison recouverte d’icônes qui sépare la nef du sanctuaire dans les églises orthodoxes. Gontcharova expose cet ensemble dans son intégralité lors de sa rétrospective en 1913 à Moscou. Elle considère pourtant chaque panneau comme une œuvre en soi et les présente souvent séparément.