Secondary Successions/Successions secondaires

L’intérêt de Paul-Armand Gette – artiste autodidacte, comme il aime le préciser – pour les sciences naturelles et leur méthodologie est déterminant. Par ennui ou par amusement, il observe, prend des notes, photographie, collecte, ramasse, mesure, classe. L’effort déployé ne vise cependant jamais à enrichir la connaissance scientifique et reste d’ordre strictement artistique. La principale préoccupation de l’artiste consiste à subvertir les codes et règles qui régissent notre façon de percevoir notre environnement naturel ou culturel. Secondary Successions / Successions secondaires – dont le titre est emprunté à une expression scientifique désignant un nouveau peuplement végétal spontané dans un écosystème – est une de ses œuvres « botaniques » les plus importantes. Sur dix-huit panneaux sont présentés les résultats liés à son herborisation citadine : graphes, cartes, listes de plantes, photographies en noir et blanc et plantes séchées. Suite à ses observations menées à Paris sur la rive droite de la Seine et le long du canal Saint-Martin, et à Londres au bord de la Tamise et le long du Regent’s Canal, Gette établit un parallèle entre les deux villes. Au-delà de l’approche de la nature, la réflexion sur le langage – l’utilisation des noms latins des plantes les plus humbles poétisant la banalité – et sur la perception fonde tout autant le travail de l’artiste. Comme Xavier de Maistre ou le personnage de Des Esseintes de J.-K. Huysmans, l’artiste voyage et nous fait entrevoir des contrées aux noms évocateurs d’exotisme tout en restant sur place. Secondary Successions… formait le noyau de l’exposition personnelle de Gette à l’ICA de Londres en 1973, la partie française ayant déjà été présentée en 1972 à la Galerie Weiller à Paris.

Jonas Storsve

Source :
Extrait du catalogue Collection art contemporain - La collection du Centre Pompidou, Musée national d'art moderne , sous la direction de Sophie Duplaix, Paris, Centre Pompidou, 2007