Fonds d'archives
Fonds Galerie Daniel Cordier
1956

Fonds Galerie Daniel Cordier
1956 -
Importance matérielle | 139 boites |
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Présentation du fonds
Le fonds Daniel Cordier rend essentiellement compte des activités de sa galerie parisienne sur huit années, de 1956 à 1964, mais également du fonctionnement de ses galeries installées à l'étranger : à Francfort et à New-York. De plus, une dizaine de cartons se rapporte aux archives de Daniel Cordier après la fermeture de sa galerie parisienne, elles sont liées à la gestion de sa collection (prêts pour expositions, ventes et achats d'oeuvres, transports d'oeuvres etc.) et comprennent également des archives d'ordre plus personnel (gestion de ses biens, correspondance privée, liens avec la résistance etc.). Soulignons enfin dans ce fonds, quelques pièces exceptionnelles comme les archives Réquichot notamment à travers ses cahiers manuscrits, un dessin préparatoire "Sitting... six months later" de Öyvind Fahlström (1962), un dessin sur calque de Matta [ca 1960], des tirages photographiques des "Graffiti" de Brassaï etc.
En 1946, il débute sa collection personnelle par l'achat d'une toile de Dewasne. Il s'inscrit alors à la Grande Chaumière où il fait la connaissance de Réquichot et Kalinowski. Il suit en parallèle les conférences de Dewasne sur l'art abstrait à Saint-Germain-des-Prés, d'octobre 1950 à juin 1952, qui auront une profonde influence sur sa pensée esthétique. Daniel Cordier construit alors des reliefs composés de formes découpées dans un contre-plaqué épais, collées, superposées, enduites, poncées puis recouvertes de couleurs vives et noires. Ces dix ans de pratique lui donnent une sensibilité reconnue et une certaine exigence.
En novembre 1956, il ouvre sa première galerie au 8 rue Duras (Paris, 8ème arr.), située entre les galeries Charpentier et Rive droite. Il déménage en mai 1959 au 8 rue de Miromesnil (Paris, 8ème arr.). Cette seconde galerie s'ouvre alors avec l'exposition de Jean Dubuffet, "La Célébration du sol". Ce quartier est alors le point de rencontre le plus actif du marché parisien. Les années 1950-1960 sont marquées par une certaine euphorie et de nombreuses petites galeries se créent à Paris.
Le 10 décembre 1958, Daniel Cordier ouvre une autre galerie à Francfort en Allemagne, au 21 Taunusanlage, avec la collaboration de Pierre de Montbas jusqu'en février 1962, puis de Stadler jusqu'en mai. Cette galerie s'ouvre également avec l'exposition de Jean Dubuffet, "Lob der Erde".
Le 09 décembre 1960, il ouvre une galerie à New York, au 970 Madison Avenue, avec la collaboration de Michel Warren, puis celle d'Arne Ekströme de 1962 à 1965.
Daniel Cordier s'intéresse d'abord à l'art abstrait, celui qui "tire son élan créateur des profondeurs de l'inconscient et des mystères de l'irrationnel". Ce sera l'orientation première de sa galerie. Il ne cherche pas à défendre un mouvement particulier ou une école. La galerie propose des expositions personnelles d'artistes qu'il découvre. Elle est un lieu de recherche, sorte de débouché de l'atelier où Daniel Cordier aime parier sur les jeunes talents. Au début, il expose en particulier des oeuvres sur papier, plus tachistes que graphiques, exécutées selon une esthétique du hasard (tel que Claude Viseux).
Le 10 juin 1964 ouvre la dernière exposition de la galerie. "Huit ans d'agitation" réunie tous les artistes importants de la galerie : Dubuffet, Michaux, Matta, Dewasne, Bellmer, Rauschenberg, etc. Daniel Cordier avait décidé de fermer sa galerie dès le mois d'avril, pour se consacrer notamment à l'organisation des grandes expositions (il participera à celle de "72 - 12 ans d'art contemporain en France"). Dans une lettre envoyée à 6000 personnalités du monde de l'art et intitulée "Pour prendre congé", il explique les raisons de cette fermeture : la crise financière, le découragement dû au manque d'amateurs français, le conformisme du goût français, l'absence de politique fiscale favorable à l'achat d'oeuvres par les particuliers, l'emprise trop contraignante des problèmes de gestion d'un marchand, etc. Sa lettre se veut être un cri d'alarme pour la profession. Pour toutes ces raisons, il considère alors s'être éloigné de son objectif premier, l'amour de la peinture, en se consacrant au commerce pour faire vivre sa galerie : "le danger pour un marchand de tableaux qui aime la peinture est de devenir un commerçant, de perdre tout contact avec ce qui a été à l'origine de son entreprise l'amour de l'art" (Daniel Cordier, 1964).
Daniel Cordier aura été le marchand de Michaux, Dubuffet, Dewasne, Bellmer, Dado, Fred Deux, Matta, Millarès, Fahlström, Nevelson ou Réquichot. Ce dernier est d'ailleurs l'artiste le plus représenté dans le fonds. La galerie Daniel Cordier présenta certaines des expositions les plus importantes de l'époque : "La célébration du sol" de Dubuffet (1959), l'exposition des "encres" de Michaux (1962), l'Exposition inteRnatiOnale du Surréalisme "E.R.O.S" (1960) consacrée à l'érotisme ou encore, la première exposition française des "Combine paintings" de Rauschenberg (1961).
Adresses : 8 rue de Duras 75008 (1956-1959) et 8 rue de Miromesnil 75008 (1959-1964)
Direction : Daniel Cordier
Expositions notables :- Exposition inteRnatiOnale du Surréalisme (EROS) [1959]- Huit ans d'agitation [1964]- Jean Dubuffet [1956, 1959, 1960 (2), 1962]- Réquichot [1957, 1960, 1963, 1964]- Bernard Schultze [1958, 1960, 1962]- Dado [1958, 1960, 1961]- Horst Egon Kalinowski [1958, 1963]- Robert Rauschenberg [1961]
Autres activités : Succursales à Francfort (1958-1962) et à New York (Galerie Cordier & Warren, 1960-1962, Galerie Cordier & Ekström, 1962-1965).
[Source : Fiche signalétique de Julie Verlaine]
Biographie
Daniel Cordier est né en 1920 dans une famille bourgeoise industrielle bordelaise, proche de l'Action Française. Le 21 juin 1940, il embarque avec d'autres volontaires pour la Grande-Bretagne afin de rejoindre les Forces françaises libres. Parachuté en France fin juillet 1942, il rencontre Jean Moulin dont il devient secrétaire jusqu'à son arrestation le 21 juin 1943. Le 9 février 1943, Jean Moulin, collectionneur et artiste, ouvre la Galerie Romanin à Nice, qui lui sert de couverture lors de ses déplacements. Ce dernier fait découvrir à Daniel Cordier la peinture et lui offre le 27 mai 1943, lors d'un de leurs rendez-vous clandestins parisiens, l'ouvrage de Christian Zervos : "Histoire de l'art contemporain". En mars 1944, après un passage clandestin de la frontière, il est interné dans la prison espagnole de Pampelune, puis au camp de Miranda. Quelques semaines plus tard, après sa libération par les Anglais, il passe une semaine à Madrid avant d'être rapatrié. Il y découvre le Prado et la peinture ancienne qui constitue une véritable découverte et un éblouissement pour lui. Plus tard, par l'intermédiaire de Jeanne Bucher, il découvre la peinture de Nicolas de Staël qui sera une révélation de l'art moderne.